Retour à … l'essentiel !
Les Essentielles de Faustine Noguès. Mise en scène de l’autrice. Théâtre de la Cité internationale, jusqu’au 16 décembre à 19 heures. Samedi 18 heures. Tél. : 01 85 53 53 85. theatredelacite.com. Puis tournée.
Texte de la pièce publié aux Éditions l’Œil du Prince.
Bien malin qui pourra dire dans quel registre de jeu se développe la dernière pièce de Faustine Noguès qu’elle a elle-même mise en scène. La jeune femme se sera en effet évertuée tout au long de son spectacle à brouiller les pistes, à passer d’un genre à une autre, d’une registre d’écriture à un autre (avec talent il est vrai) ; à peine commençons-nous à nous « installer » dans une tonalité qu’il nous faut passer à son contraire ou à son inverse. Voilà qui exige sans nul doute de la part du spectateur une certaine vigilance sauf à se retrouver, de décalage en décalage, totalement perdu. Virtuose, il faut qu’il le devienne à son tour pour suivre les évolutions de la metteure en scène s’appuyant sur un art de l’écriture déjà bien maîtrisé. Alors, pour en revenir aux fondamentaux de notre présence de spectateurs, quel est véritablement l’enjeu d’une telle représentation ? Bien sûr on se raccrochera à ce que nous indique de manière forte la scénographie conçue par Hervé Cherblanc : un vaste espace qui nous imprègne déjà de l’atmosphère d’un grand abattoir industriel – créations, sonore de Colombine Jacquemont, lumineuses de Zoé Dada et Eliah Ramon, qui nous emprisonnent à l’intérieur d’un univers glacé avec ses murs à rectangles blancs et ses tubulures de fer ouvrant sur le vide dans une configuration labyrinthique. Parfait, se dit-on, mais voilà que quelques touches viennent perturber l’ensemble. Les touches : de couleurs vives, il va de soi, celles du sang. C’est bien le sang qui nourrit le lieu et ses employés : voir d’ailleurs les immense carcasses rouges qui trônent côté jardin : celles de bovins envoyés ici à la chaîne, celle d’une employée (!) qui s’est retrouvée dans la chaîne de tuerie, ce qui aura pour conséquence l’arrêt de travail des ouvriers qui vont se mettre en grève, chose peu banale dans ce lieu particulier… Mais où sommes-nous véritablement ? En plein délire d’un fiction gore ? Dans une fable visant à dénoncer violemment les méfaits d’une civilisation qui ne songe qu’au profit au détriment de ceux qu’Eugène Durif appelle les « moins que rien » ? En ce sens cet abattoir avec ses employés (Estelle Borel, Odja Llorca, Caroline Menon-Bertheux, Faustine Noguès, Alexandre Pallu, et Martin Van Eeskhoudt) et sa patronne déjantée (Armande Sanseverino) comme perdus dans le lieu et ne sachant plus que faire, cet abattoir est bien le symbole de notre société pas si bien huilée que cela… Sa métaphore en quelque sorte… Faustine Noguès nous la met sous le nez avec ses multiples et parfois dérisoires et même comiques facettes.
Photo : © Christophe Raynaud de Lage