Fausse tension

Jean-Pierre Han

8 mars 2023

in Critiques

ADN de Dennis Kelly. Adaptation et mise en scène de Marie Mahé. Théâtre de la Tempête, jusqu’au 19 mars à 20 h 30. Puis au théâtre Lepic les 21 et 22 mars. Tél. : 01 43 28 36 36.

Pièce ADN6

La rumeur nous y incite fortement : il faut suivre la jeune et donc prometteuse Marie Mahé et son équipe toute à elle dévouée, la compagnie DTM 9.4. D’ailleurs dans ce dernier opus, ADN, elle occupe, sans problème, tous les postes : adaptatrice du texte choisi (par elle ?), metteure en scène (qui comprend, ça va de soi, la direction d’acteur qui a ici une réelle importance), interprète, scénographe, avec Isabelle Simon quand même, costumière… Une sacrée personnalité donc présente ici et là, qui a raflé le prix Théâtre 13/jeune metteur en scène, à l’unanimité, s’est même fait accuser de plagiat, etc. Au résultat cependant, on reste dubitatif.

On comprend bien le choix de la pièce de Dennis Kelly, soi-disant « fortement poétique et politique ». Admettons, mais pour aussi talentueux et reconnu que soit l’auteur, on admettra quand même que sa pièce ADN écrite en 2007 a quelque peu vieilli, ne serait-ce que dans le choix de son sujet avec son histoire d’un groupe d’adolescents s’acharnant sur un de leur souffre-douleur de camarade qui finira, poussé à bout, par se tuer accidentellement. Les quatre harceleurs cherchant dès lors à cacher la disparition de leur victime et devant, pour ce faire, rester unis, solidaires dans leurs mensonges. La structure de la pièce est mise à nu, l’adaptatrice ayant notamment réduit le nombre de personnages de la pièce initiale. Reste une sorte de partition pour quatre comédiens, au lieu des onze de la pièce originale, qui, dans le jeu imposé, s’en sortent comme ils le peuvent, avec de bons moments : la première scène entre deux des protagonistes, Marie Mahé et Achille Reggiani le premier soir puisqu’il joue en alternance avec Tigran Mekhitarian. Il y a, à l’évidence, une volonté intéressante de se départir de toute approche réaliste, aussi bien au plan de la gestuelle que de la profération. Tout malheureusement n’est pas de la même eau, le jeu finit par se stéréotyper dans le sur-jeu et l’énergie déployée par les uns et les autres ne suffit pas à pallier le manque de réelle profondeur de l’ensemble ; la machine grippe, et l’on reste dans le convenu. Pas facile de faire des pas de côté de la doxa.

Photo : © ema_Martins