Une leçon de vie

Jean-Pierre Han

9 avril 2014

in Critiques

Infinita par la Famille Flöz. Théâtre le Monfort, jusqu'au 13 avril à 20 h 30. Tél. : 01 56 08 33 88.

L'immense plaisir que procure le spectacle Infinita de la Famille Flöz, un collectif d'artistes internationaux venu d'Allemagne, réside tout entier dans un paradoxe. Sans même parler du titre, il est en effet ici essentiellement question de fins de vie et de mort. La majeure partie des séquences – puisque le spectacle fonctionne de cette manière-là – se passe dans une maison de retraite avec ses vieux pensionnaires et une pimpante infirmière qui cherche périodiquement à se protéger et à trouver refuge dans son local. Et pourtant c'est une éclatante leçon de vie que les quatre interprètes, silhouettes bien campées et visages enfouis sous des masques qui accentuent la caricature, endossant la responsabilité de multiples rôles nous offrent avec une alacrité, une finesse, une intelligence de jeu et une drôlerie… infinies. Lumières de la salle à peine éteintes défilent en ombres chinoises sur l'écran qui constitue le fond de scène une multitude de personnages, longue procession dans ou vers l'au-delà. Puis un personnage en chair et en os si on ose dire vient déposer une rose sur une tombe figurée par un rai de lumière. Le ton est ainsi donné. Cependant, la première séquence nous renvoie aux… balbutiements de l'enfance et déjà à la cruauté des premiers jeux et des premières relations humaines. Là l'inventivité, une inventivité de tous les instants, des quatre clowns fait merveille. On l'aura compris, nous sommes conviés à assister au parcours de la vie humaine, de toute vie humaine, avec ses mille et une petites incidences, ses mille et une émotions, de l'éveil à la vie au sommeil de la mort. Un parcours comme on en redemande, tant la Famille Flöz se démène avec efficacité, pertinence et humour pour le rendre agréable sans pour autant lui ôter un arrière-goût d'inquiétude. Des clowns, les interprètes d'Infinita ? Sans aucun doute, mais d'un genre particulier (notamment avec ses touches de tendresse) et avec une maîtrise corporelle étonnante. Le spectacle est muet, mais la Famille Flöz nous parle véritablement, mieux qu'avec des paroles.



Jean-Pierre Han