Avignon "in" : Combat chic et choc

Jean-Pierre Han

19 juillet 2011

in Critiques

Clôture de l'amour de Pascal Rambert. Salle Benoît XII. Jusqu'au 24 juillet à 18 heures. Tél. : 04 90 14 14 14.

Pascal Rambert a écrit un bon nombre de textes ; cela en fait-il pour autant un auteur de théâtre à part entière ? Réponse avec sa dernière œuvre, Clôture de l'amour, qui cependant et selon ses dires, est particulière dans sa production ? Cette œuvre a été spécialement écrite pour deux comédiens, Stanislas Nordey et Audrey Bonnet qui conservent leurs prénoms, Stan et Audrey, lors du déroulement de la pièce qui se passe dans une salle de répétition reconstituée par Daniel Jeanneteau. Car nous sommes encore et toujours au théâtre, et la mise en abyme est toujours de rigueur ici comme ailleurs. C'est donc dans cette salle de répétition qui pourrait s'apparenter, sous la lumière blafarde des néons, à une salle d'asile (au fond l'une et l'autre sont assez proches, c'est ce que pourrait laisser suggérer la pièce de Rambert) avec ses murs blancs, que va se danser la comédie – une comédie d'une rare violence verbale – de la rupture entre Stan et Audrey, dans deux monologues d'une heure chacun, avec juste l'interruption d'une chorale d'enfants venue répéter là. Deux monologues donc, le premier asséné par Stanislas Nordey qui ouvre donc les hostilités, puisque c'est de cela dont il s'agit, avant qu'Audrey Bonnet ne lui réplique avec la même intense férocité. Deux monologues donc, et deux numéros d'acteurs conçus comme tels, époustouflants sûrement, mais qui finissent par devenir lassants à telle enseigne que l'on a l'impression que les interprètes, passant une scène devant un jury de cour de théâtre doivent absolument faire montre de toute la maîtrise de leur art. La mise en scène de Pascal Rambert les y pousse ; mêmes mouvements, même chorégraphie, la femme prenant simplement la place de l'homme dans sa partie. Les deux protagonistes sont placés en diagonale ; il y a celui ou celle qui attaque avec les mêmes trajectoires de prédateur devant sa proie, avec les mêmes gestes, et l'autre qui reçoit en silence les coups, au sens physique du terme. A ce jeu, les réactions finissent cependant par être redondantes ou par illustrer les propos tenus par celui qui parle… et l'on se met à se demander quelle aurait été le résultat de ce duel si l'interlocuteur avait été absent de la scène… Comme quoi le spectateur a le temps de laisser vagabonder son imagination durant le combat, car aussi serrée soit l'écriture de Rambert – elle n'a bien sûr aucune envergure poétique –, on finit par en déceler les ressorts et à mettre au jour son squelette. Une certaine grandiloquence assortie de clichés ne permet guère au texte de s'élever : on reste au ras d'une scène de ménage traditionnelle, juste un peu plus acerbe. À qui s'adresse-t-elle ? On songe alors à Angelica Liddell vomissant sur la classe moyenne intello-bourgeoise…

Jean-Pierre Han

Clôture de l'amour par Pascal Rambert. Les Solitaires intempestifs. 86 pages, 13 €.