Le système Veronese

Jean-Pierre Han

14 février 2010

in Critiques

La Standard idéal, 7e édition. Jusqu’au 19 février. MC 93-Bobigny. 01 41 60 72 72.

Un mot seulement sur un spectacle fort attendu au vu de la dernière production présentée l’année dernière par le même metteur en scène, Daniel Véronèse et sa compagnie composée de comédiens extraordinaires, dans le même théâtre, la MC 93 de Bobigny, dans le cadre de la même manifestation, le Standard idéal, dont on ne louera jamais assez la qualité et la nécessaire existence. Un mot seulement car les spectacles venus de tous les horizons ne sont programmés que deux ou trois fois, et disparaissent donc aussi vite qu’ils étaient apparus. Ne restent que des souvenirs éblouis, comme reste le souvenir ébloui d’Oncle Vania de Tchekhov présenté dans un espace minuscule, et qui obtint un tel succès qu’une tournée pu être organisée. Un tel phénomène touchera-t-il Une maison de poupée d’après Ibsen présenté cette année (avant Hedda Gabler du même Ibsen) ? Rien n’est moins sûr, car cette fois-ci l’intelligence du metteur en scène toujours accompagné d’une formidable troupe de comédiens rompus à son esthétique, fonctionne beaucoup moins bien. Daniel Veronese veut-il trop en dire qui affuble Une maison de poupée d’un sous-titre qui entend signifier beaucoup : Le développement de la civilisation à venir ? Pourquoi pas si ce n’est qu’une telle intention n’ajoute rien au travail présenté. Loin de là. Dès lors, c’est à assèchement de la pièce d’Ibsen auquel on assiste, et si les premières minutes du spectacle sont éblouissantes, drôles, caustiques, tout finit par retomber au point qu’apparaît une sorte de système (un peu comme pour le TG Stan auquel on pense parfois dans la manière qu’ont les acteurs de casser le texte, de le mettre à distance et en question). Quant à la pièce d’Ibsen, il n’en reste effectivement qu’un squelette, et si tous les personnages sont bien là, on finit par se demander quel est leur rôle : que vient faire l’ami de la famille, le docteur Rank qui dans la pièce originale porte en lui la dimension de la mort, transformé en amie qui ne fait que passer ? On a du mal aussi à bien saisir la soudaine prise de conscience de l’héroïne de la pièce, et ce n’est certainement pas le talent de l’actrice, Maria Figuerias, qui est en cause. Dommage, mais peut-être fallait-il voir Hedda Gabler pour avoir une vision globale du projet. Un autre mot, puisqu’il s’agit toujours du Standard idéal, pour simplement dire tout le bien de Blackface présenté par les néerlandais d’Orkater, une compagnie qui sous le nom de Hauser Orkater était déjà passé à Bobigny à la fin des années soixante-dix, et avait pu montrer toute l’inventivité de leur travail.

Jean-Pierre Han